lundi 11 janvier 2021

La race des orphelins

La race des orphelins,

Oscar Lalo,
Ed. Belfond, 2020


Mot de l'éditeur :

" J'ai longtemps rêvé que l'histoire de ma naissance exhibe ses entrailles. Quelle que soit l'odeur qui en surgisse. La pire des puanteurs, c'est le silence. "
Je m'appelle Hildegard Müller. Ceci est mon journal.
Je m'appelle Hildegard Müller. En fait, je crois que je ne m'appelle pas.
J'ai soixante-seize ans. Je sais à peine lire et écrire. Je devais être la gloire de l'humanité. J'en suis la lie.
J'ai besoin, avant de mourir, de dire à mes enfants d'où ils viennent, même s'ils viennent de nulle part.
Qui est Hildegard Müller ? Le jour où il la rencontre, l'homme engagé pour écrire son journal comprend que sa vie est irracontable, mais vraie.
Oscar Lalo poursuit son hommage à la mémoire gênante, ignorée, insultée parfois, toujours inaccessible. Il nous plonge ici dans la solitude et la clandestinité d'un des secrets les mieux gardés de la Seconde Guerre mondiale. 

 

Dealer : Bibliothèque de Sibiril

 

Ma lecture :

Dès sa sortie l'année dernière, j'ai eu envie de lire La race des orphelins. Cette période de l'Histoire, la Seconde Guerre Mondiale, me fascine, et il y a encore des secrets bien gardés. Des secrets honteux.

J'ai lu quelques romans sur les lebensborn, ces établissements sous le régime nazi où des bébés étaient formatés pour devenir de parfaits Allemands, de sang pur, prêts à repeupler le Reich. D'où venaient-il ? Deux solutions : ils pouvaient être kidnappés et arrachés à leurs familles en Pologne ou ailleurs en Europde de l'Est ; ou ils étaient conçus par des aryens sélectionnés qui offraient leurs bébés à la nation.
Hildegard Müller est de ceux-là. En 1945, elle a 18 mois lorsque son lebensborn est libéré. Mais elle ne sera pas libre pour autant, passant d'un établissement à un autre, d'un organisme à un autre, d'une insulte à une autre. Personne ne veut de ces enfants du Reich, ces enfants de Hitler. Personne. Et il n'y a personne à qui les rendre. Personne.
A la fin de sa vie, Hildegard souhaite écrire son journal avec un "écrivain, un scribe ; un traducteur en quelque sorte." Mais la matière première est très floue : elle ne possède aucune photo, sa date de naissance est approximative, ses noms et prénoms totalement incertains, ses parents inconnus, ... Elle livre alors l'histoire de ces enfants du Reich abandonnés à leur sort, leur destin, leur dessein mis en échec avec la chute du Reich.

Le texte d'Oscar Lalo est court, un paragraphe par page : une mise en page particulière. Texte court qu'on ne lit pas d'une traite, qu'on n'avale pas sans déguster la beauté des mots ni sans déglutir les maux qu'ils traduisent. L'auteur se fait ici artisan et redonne aux mots leurs véritables sens. Chacun est pesé, sous-pesé, et posé à côté d'un autre pour qu'ils s'éclairent l'un l'autre.

Une histoire sombre et sensible, évidemment, mais portée par une écriture lumineuse et sensible.
C'est beau, c'est brut : un véritable diamant. Merci pour cette beauté littéraire !


Avis des lecteurs:

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