Berlin Requiem,
Xavier-Marie Bonnot,
Ed. Plon, 2021
Mot de l'éditeur :
Berlin, 1932. Wilhelm Furtwängler est l’un des plus grands chefs
d’orchestre allemands. Il dirige l’orchestre philarmonique de Berlin et
éblouit son public par son génie virtuose.
1934. Hitler est chancelier et détient tous les pouvoirs, c’est le début
des années noires. Le nazisme s’impose et dépossède les artistes de
leur art. Les juifs sont exclus de l’orchestre et contraints de
s’exiler. La culture devient politique. La musique devient un véritable
instrument de propagande. Continuer d’exercer son art mais en se
soumettant au régime du III Reich ou fuir l’Allemagne ? Pour
Furtwängler, ce choix n’a pas de raison d’être. Mais l'art est-il
véritablement au-dessus de la politique ? La passivité étant souvent
interprétée comme un signe d’acceptation et de collaboration, cela
pourrait bien lui porter préjudice…
En parallèle, Rodolphe Meister, fils d’une célèbre cantatrice ayant
chanté dans les opéras les plus prisés de la capitale, contemple et vit
les évènements avec son regard de jeune garçon. La guerre se profile au
loin mais lui ne comprend pas. De ses yeux naïfs, il voit tous ces SS
qui ont fière allure dans leurs uniformes. Il ne perçoit pas le mal.
Lui, ce qu’il veut, c’est devenir le plus grand chef d’orchestre que
l’Allemagne n’ait jamais connu. Il a ce don en lui. Les notes lui
parlent, le transportent. La musique l’anime depuis toujours et ni la
guerre, ni la déportation de sa mère, ni l’absence de père, ne
parviendront à détruire ses ambitions. Il le sait, il sera le prochain
Furtwängler.
Le destin de ces deux âmes se croisent et se rejoignent harmonieusement,
comme des notes de musique, pour former la plus belle des partitions.
Le positionnement de Wilhelm Furtwängler pendant la seconde guerre
mondiale est une zone obscure éclairée par la plume de Xavier-Marie
Bonnot, qui, par son histoire, écrit l’Histoire.
Dealer : Net Galley / Plon
Ma lecture :
Je tiens tout d'abord à remercier la plateforme NetGalley et la maison d'éditions Plon pour l'envoi de ce roman de Xavier-Marie Bonnot. J'avais déjà beaucoup aimé Le tombeau d'Apollinaire, alors ce roman autour de la musique et du IIIème Reich avait de bonnes chances de me plaire...
Berlin Requiem nous plonge dans une Allemagne qui accueille, tout doucement, le nazisme. L'idéologie, antisémite interdit d'abord les concerts de compositeurs juifs, comme Offenbach ou Mendelssohn. Puis ce sont les musiciens et chefs d'orchestre juifs qui sont, au mieux, évincés de la scène musicale et publique du pays. Quelques artistes, pourtant non-juifs, quittent l'Allemagne en signe de soutien à leur compères et de mécontentement envers le gouvernement. Furtwängler, grand chef d'orchestre berlinois, décide de rester. Jouer devant Hitler, Gobbels ou Himmler le révulse au plus haut point, mais il se soumet pourtant. Signe d'allégeance ou de Résistance ? Au sortir de la guerre, il lui faudra rendre des comptes... Et si la musique était au-dessus de tout ça ? Pas si sûr quand on sait le rôle que les arts ont joué dans la propagande et le cynisme nazis.De Theresienstadt à Auschwitz, des orchestres étaient mis en place pour implanter un soupçon de vie dans les camps de la mort. Certains y ont même pu sauver leur peau en tant que musiciens. C'est le cas de la cantatrice berlinoise, qui a a longtemps joué pour Furtwängler, Christa Meister.
En 1954, quand l'Opéra du Danemark recherche son nouveau chef d'orchestre, Rodolphe Meister, le fils de cette cantatrice, qui a toujours grandit dans la musique, postule.Depuis tout petit, il jouait dans les coulisses de salles de concerts et d'opéras, baigné par la musique et déjà mu par des rêves de grande carrière. Il rencontre même, juste avant guerre le grand Furtwängler. Et c'est justement lui, des décennies plus tard, qui laisse sa place au Danemark....
Entre les notes se jouent une autre musique celle de l'identité. L'identité réelle de Furtwängler, le chef d'orchestre accusé, après guerre, d'avoir sympathisé avec Hitler. L'identité de Christa qui, après sa déportation n'est plus que l'ombre d'elle-même. Et enfin celle de Rodolphe dont sa mère a toujours tu le nom de son père...
J'ai aimé le contexte du roman : mêler la musique à l'Histoire était très pertinent. Se posent alors des questions de moralité : jouer pour le régime nazi est-il un acte de collaboration ? La zone d'ombre autour de Furtwängler est indéniablement bien traitée.
Je suis néanmoins moins emballée par Berlin Requiem que je ne l'avais été pour Le tombeau d'Apollinaire. Je me suis moins attachée aux personnages : peut-être n'ont-ils pas été assez poussés ? Christa, Rodolphe et Furtwängler sont trois personnalités tout à fait intéressantes, j'aurais aimé creuser plus. Je les quitte à regrets.
Avis des lecteurs:
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