lundi 10 mars 2025

La petite-fille

La petite-fille,

Bernard Schlink,
Ed. Gallimard, 2023


Mot de l'éditeur :

"Il aurait bien aimé avoir des enfants, il n'en avait eu aucun - maintenant il avait donc une petite-fille. Et puisque à présent il l'avait, il devait aussi se soucier de son âme." 

À la mort de son épouse Birgit, Kaspar découvre un pan de sa vie qu'il avait toujours ignoré : avant de quitter la RDA pour passer à l'Ouest en 1965, elle avait abandonné un bébé à la naissance. Intrigué, Kaspar part à la recherche de cette belle-fille inconnue et remonte jusqu'à Svenja qui, restée en Allemagne de l'Est, a épousé un néonazi et élève dans cette doctrine une fille nommée Sigrun. Kaspar serait prêt à voir en elles les membres d'une nouvelle famille. Mais leurs différences idéologiques font obstacle : comment une adolescente aussi intelligente que Sigrun peut-elle soutenir des théories complotistes et racistes ? Comment l'amour pourrait-il naître dans ce climat de méfiance et de haine ? Bernhard Schlink offre de nouveau un grand roman sur l'Allemagne qui questionne la façon dont le passé imprègne le présent et interroge nos divisions intestines comme nos élans fraternels.


Dealer : Père Noël


Ma lecture :

Passionnée par la Seconde Guerre mondiale, j'étais intéressée par l'angle de ce roman : la survivance du nazisme après-guerre et après la réunification de l'Allemagne. 

Au décès de sa femme dépressive et alcoolique, dans les années 2000, Kaspar lui découvre tout un pan secret de sa vie. Elle a eu une fille dans les années soixante avant de quitter la RDA et de rejoindre Berlin Ouest. Elle n'en a jamais parlé. Kaspar parvient à remonter jusqu'à elle : elle a épousé un néonazi et élèvent tous les deux leur fille, Sigrun, âgée de 14 ans, dans cette idéologie. Pour Kaspar, libraire et ouvert sur le monde, c'est insupportable et invente alors une histoire d'héritage pour sa rapprocher de la petite-fille et la faire sortir de cette idéologie. L'adolescente a grandi dans la haine des étrangers et de la culture de l'ouest. Ses lectures se limitent à des romans d'aventure qui glorifient le nazisme. Le héros vénéré de la famille ? Rudolf Hess. L'avenir de la petite-fille ? Reprendre la ferme de ses enfants et y élever, toujours dans cette doctrine néonazie, une multitude d'enfants dignes du IIIème Reich.

Le grand-père ouvre une porte à la petite-fille. Il lui fait découvrir le piano et, doucement, la fait douter de son idéologie. Mais renier son éducation, c'est renier aussi ses parents. Psychologiquement, c'est très difficile pour la jeune fille qui s'épanouit pourtant chez son grand-père. Il lui offre une échappée culturelle, la sort de son endoctrinement, et en retour, au veuf sans enfant, elle offre une vie de famille à laquelle il ne croyait plus. C'est donc l'amour qui va sortir Sigrun de ses préceptes néonazis.

L'Allemagne réunifiée vit encore avec ses traumatismes de guerre et la dénazification paraît impossible pour les derniers extrémistes. Sigrund, désormais consciente de son endoctrinement, s'ouvre au monde mais reste, par réflexe, attachée à certains principes néonazis.
Il faudra des générations pour réparer l'Allemagne, après les années de nazisme et les années plombées par le Mur, tant les fardeaux sont lourds à porter et encore parfois difficiles à exprimer.

Un roman complexe où les questions psychologiques, idéologiques et philosophiques sont vraiment très pertinentes. Un roman qui se lit et surtout, se réfléchit. La matière brute est sombre mais en rejaillit une belle lumière.


Avis des lecteurs:

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