vendredi 17 août 2018

Je suis Jeanne Hébuterne

Prix du Meilleur roman Points 2019 Elkaim Jeanne Hébuterne blog chronique critique jurée jury lecteur

Je suis Jeanne Hébuterne,

Olivia Elkaim,
Ed. Points, 2018
Ed. Stock, 2017


Mot de l'éditeur :

Décembre 1916. Dans la pénombre d'un escalier, Jeanne Hébuterne tombe amoureuse d'Amedeo Modigliani. Elle peint modestement, lui est un artiste maudit. Elle vit encore dans le cocon familial, il mène une existence dissolue entre son atelier, les cafés parisiens et les prostituées. Elle abandonne tout pour le suivre. La passion les emporte. Incandescente, destructrice. Jusqu'à la folie...



 

Ma lecture :

J'ouvre le bal de mes lectures pour le Prix du Meilleur Roman Points : j'ai été sélectionnée comme Jurée pour l'édition 2019 ! Chaque mois, je devrai lire environ trois romans.
Je commence donc avec Je suis Jeanne Hébuterne...

Avant de commencer, savez-vous qui est Jeanne Hébuterne ? C'est un personnage qui a vraiment existé. Elle a vécu une foudroyante histoire d'amour avec le peintre Amedeo Modigliani, au début du XXème siècle. Modigliani, je ne connais ce peintre que de nom, mais son cousin éloigné, Patrick Modiano, fait partie de mes écrivains préférés.
Mais revenons au roman d'Olivia Elkaim...


En commençant ce roman, peut-être à reculons d'ailleurs, je ne savais pas où je mettais les pieds. Nous sommes dans le Paris du premier quart du XXème siècle où le peintre Amedeo Modigliani peine à percer et donne des cours à l'Académie Colarossi. Là, il rencontre une jeune étudiante qui a quelques talents, Jeanne. C'est le coup de foudre immédiat. Amedeo est frivole, libre, artiste ; Jeanne, elle, vit dans une famille bourgeoise catholique. Ils n'ont rien à faire ensemble ! Mais l'amour est là, et malgré ses propres réticences, Jeanne succombe au charme du peintre italien. Son frère, André, est au front et se bat pour la patrie. Tout au long du roman, il lui parle intérieurement. Nous avons le diablotin Amedeo qui dévergonde Jeanne, et le petit chérubin André qui reste impuissant. Son amour, sa passion l'emportent sur sa raison. Olivia Elkaim a très bien décrit ça : le combat intérieur de la jeune fille pour ne pas céder à sa passion. Jeanne n'est pas une bécasse ingénue. Elle est juste tombée amoureuse. Et justement, folle amoureuse, la jeune fille de 19 ans quitte l'appartement bourgeois familial pour vivre sa passion avec Amedeo. Qu'a-t-il à lui offrir, lui ce peintre déjà maudit ? Son amour, des folles soirées bohèmes autour d'André Breton, Picasso ou Cendrars, de la peinture. Mais une chambre miteuse où le peintre ne vient que par intermittence, plus occupé à "aimer" ailleurs et où le couple ne mange pas à sa faim. Jeanne, amoureuse, accepte tout cela, cette lente, presque douce, descente aux enfers. Elle rompt avec sa famille, même si elle parvient à rester en contact avec sa mère, qui vient même à l'appartement, mais son père et son frère André sont contre ce couple maudit. Que fait Jeanne avec ce peintre italien juif à la réputation sulfureuse ? Pourvu qu'elle ne tombe pas enceinte... Cela mettrait à mal leur propre réputation.

J'ai lu ce roman à reculons, et pourtant, j'ai eu du mal à le lâcher et l'ai lu en une journée. Le personnage de Jeanne est complexe et attachant. On grogne contre Modigliani qui la délaisse et qui se joue d'elle. On souffle, rassurés, quand, enfin, il lui offre tendresse et amour. Car c'est cela : il y a les jours où Modigliani est un doux amant et les jours où il s'envole vers d'autres univers féminins. Le peintre est malade aussi, la tuberculose prend peu à peu le dessus. Le bonheur que le couple a malgré tout pu construire s'écroule tragiquement.

Je suis Jeanne Hébuterne est un roman intense sur la folie de l'amour. La douce folie des débuts où la passion emporte tout sur son passage. Par amour pour le peintre, dont elle ne doute pas du succès à venir, Jeanne met son propre talent de côté et ne vit que pour Amedeo Modigliani. Elle se fond véritablement derrière son amoureux, derrière son amour. Elle incarne le destin brisé.
Cette histoire m'a rappelé une histoire d'amour fulgurante et passionnelle qui s'est aussi tragiquement terminée. L'histoire entre une grande comédienne française et une icône du rock français, qui s'est brisée un été de 2003 au fin fond de l'Europe de l'Est...
Alors ce roman d'Olivia Elkaim m'a profondément touché car elle a su raconter, par la voix de Jeanne Hébuterne, la passion amoureuse, la folle passion amoureuse, devrais-je dire, et le tragique des destins brisés.

Belle découverte, donc. Merci aux Editions Points car, c'est certain, de moi-même, je n'aurai jamais ouvert ce roman... Or, la littérature, c'est, aussi, oser sortir des sentiers battus. Je suis sortie. Peut-être pas indemne.



Jeanne Hébuterne, peinte par Modigliani,
1917



 Amedeo Modigliani
 


 #PMR2018


 

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