mercredi 23 janvier 2019

La chute des Géants

 

 


 

La chute des Géants,

Ken Follett,
Ed. Robert Laffont, 2010


Mot de l'éditeur :

A la veille de la guerre de 1914-1918, les grandes puissances vivent leurs derniers moments d'insouciance. Bientôt la violence va déferler sur le monde. De l'Europe aux États-Unis, du fond des mines du pays de Galles aux antichambres du pouvoir soviétique, en passant par les tranchées de la Somme, cinq familles vont se croiser, s'unir, se déchirer. Passions contrariées, jeux politiques et trahisons... Cette fresque magistrale explore toute la gamme des sentiments à travers le destin de personnages exceptionnels... Billy et Ethel Williams, Lady Maud Fitzherbert, Walter von Ulrich, Gus Dewar, Grigori et Lev Pechkov vont braver les obstacles et les peurs pour s'aimer, pour survivre, pour tenter de changer le cours du monde. Entre saga historique et roman d'espionnage, intrigues amoureuses et lutte des classes, ce premier volet du Siècle, qui embrasse dix ans d’histoire, raconte une vertigineuse épopée où l'aventure et le suspense rencontrent le souffle de l'Histoire...




Dealer : Bibliothèque de Sibiril


Ma lecture :

J'étais attirée par les promesses de ce roman : raconter l'avant Première Guerre Mondiale, la bousculade de l'Europe et du monde dans le conflit, et l'après Guerre.
Mais j'ai eu peur de son nombre de pages (1000), de la brigade de traducteurs de Ken Follett (4), et de la flopée de personnages présentés en exergue du roman (125 !). Mais la Littérature doit-elle se mesurer aux chiffres ? Non, môssieur !

Me voilà donc toute petite devant La chute des Géants...
Enfin, nous voilà plutôt en Juin 1911, au Pays de Galles, dans la citée minière d'Aberowen. Nous rencontrons la première famille de cette saga, les Williams, mineurs de pères en fils. Cela tombe bien, j'ai visité une mine de charbon au Pays de Galles lors d'un voyage scolaire au lycée, alors, pour m'imaginer les lieux, c'était plus facile. Il est également facile pour le lecteur d'avoir de l'empathie et de la sympathie pour le jeune Billy qui, du haut de ses treize ans, entame son premier jour de travail à la mine. Il est déjà connu dans la mine, il est le fils Williams, le fils du défenseur des intérêts des mineurs. Discrète, Ethel, sa sœur aînée qui travaille comme domestique au château voisin, rêve d'une autre vie. Côtoyer le beau monde qui gravite autour du Comte Fitzherbert et de Lady Maud la fait réfléchir sur son sort. Le décor est planté : le monde ouvrier, ses mineurs, ses aspirations, ses dirigeants d'une part ; l'Aristocratie, ses codes, ses travers, ses ambitions d'autre part. Vous avez raison, cela fleure bon Downton Abbey, et cela m'a d'ailleurs plu. Le roman ira à la rencontre de plusieurs familles, de plusieurs pays, mais les personnages les plus importants viennent d'Aberowen, qu'ils soient au fond de la mine ou au balcon du château.  On parle bien de classes sociales, bientôt mises à mal par la Première Guerre Mondiale...

Autour de ces personnages gallois tournent, plus ou moins liés, des personnages du monde entier : américains, russes, anglais, allemands et français. Gus, Maud, Grigori, Ethel, Billy, Fitzherbert, Walter et Lev, tous vont être bousculés par la guerre. Certains seront dévastés, d'autres au contraire en ressortiront plus fort, mais une chose est sûre : l'Histoire fera ses armes sur leurs dos...

Je ne peux pas raconter le roman dans le détail sans dévoiler les intrigues et risquer de gâcher votre lecture. Malgré l'épaisseur et le poids du roman, j'ai été immédiatement happée par l'épaisseur des personnages et le poids de l'Histoire. Commencer à présenter la vie des personnages avant 1914 est intéressant pour comparer leurs aspirations avant et après guerre. Les classes sociales bien marquées d'avant guerre éclatent littéralement après 1918. J'ai toujours appris, dans les livres d'Histoire, que le XXème siècle commençait avec la Première Guerre Mondiale, le roman de Ken Follett tend à expliquer cela. L'Aristocratie paie très cher le prix de la Guerre, alors que le monde ouvrier, le lendemain de l'Armistice, détient les armes pour espérer un avenir meilleur. Un "tout devient possible" anime ces hommes qui, jusqu'à présent, restaient figés dans leurs classes sociales. Je parle des hommes, mais ce "tout devient possible" vaut également et surtout pour les femmes. Ces vaillantes femmes qui remplaçaient frères et maris à l'usine ou aux champs, celles qui se sont battues pour leurs droits, celles qui vont faire de leur siècle, le siècle de l'émancipation féminine. L'Europe et le monde sont éclatés : les classes sociales aussi.
Vraiment, La chute des Géants est un roman dense qui aborde les sujets cruciaux de ce début de XXè siècle, des sujets qui auront des conséquences fabuleuses ou dévastatrice sur le siècle entier. Lutte des classes, émancipation féminine, Révolution russe, Première Guerre Mondiale, American Dream sont les stations balnéaires où s'établiront les personnages du roman. En reviendront-ils indemnes ?

Réunis et divisés sur le champs de bataille, nos héros gallois, russes, allemands, anglais, américains sont tous attachants. Mais que font-il au cœur des tranchées à voir leurs camarades mourir sous leurs yeux ? Ils ne le savent même pas, ils ne sont que des pions manipulés par des chefs d'état jouant à la géopolitique.  Cette guerre est dévastatrice, 18 millions de morts : pour l'intérêt de qui, finalement ? Ken Follett montre les alliances, les enjeux politiques, européens et mondiaux des acteurs de la Première Guerre Mondiale. J'ai aimé l'approche de l'auteur : les soldats étaient bel et bien pris au piège des politiques de guerre.

Je suis cependant restée sur ma faim : les personnages sont denses et attachants, mais quid des Français ? L'auteur (gallois) ne parle que des Alliés et des allemands. On croirait presque les Français absents de ce conflit, et pourtant... ! Je suis un peu déçue de ce partie pris de mettre les Français au second plan...

Ceci dit, j'ai passé un très bon moment avec Billy, Ethel, Maud, Walter, Grigory, Gus. Aux quatre coins de la planète, le conflit a semé le doute, la mort, puis l'espoir, malgré tout. La densité des thèmes abordés, des questions posées était...gigantesque et prometteuse. Pari gagner puisque Ken Follett a su romancé les livres d'Histoire parfois imbuvables, rendre l'Histoire vivante.
Billy, Ethel, Maud, Walter, Grigory, Gus, figurants du XXème siècle vont en devenir les acteurs pour, finalement, incarner le monde nouveau et les enjeux qui s'offrent à eux.
A la fin du roman, on sent déjà les prémisses de la Seconde Guerre Mondiale. Leurs enfants seront-ils alors, tout à tour, ennemis et alliés ? La Paix n'est-elle qu'une utopie ?





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