Le vol de la Joconde,
Dan Franck,Ed. Grasset, 2019
Mot de l'éditeur :
L’histoire est connue et l’affaire insolite. Un matin d’été de l’année 1911 à Paris, un vol est déclaré au Louvre : celui du portrait de La Joconde. Tandis que la police ratisse la capitale pour retrouver le coupable, un certain Géry Pieret, voleur et fanfaron, déclare dans Paris-journal être l’auteur du crime et ne pas en être à son premier. Il aurait aussi volé au même musée d’autres œuvres, dont deux têtes ibériques datant du Vème siècle avant Jésus Christ, qu’il aurait revendu à un peintre parisien. Or si l’audacieux ne donne pas de nom, quiconque sait que Pieret fut un temps le secrétaire de Guillaume Apollinaire pourra déduire que le dit peintre n’est autre que Pablo Picasso. Voilà le peintre mouillé, alerté par son ami poète, et le décor planté. Le roman peut commencer.
Imaginez à présent Guillaume Apollinaire et Pablo Picasso en cavale dans Paris, une valise en carton à la main, passant de lieu en lieu pour essayer de se débarrasser des deux têtes qui inspirèrent les célèbres Demoiselles d’Avignon et qui manquèrent de les envoyer en prison, ou pire, de les faire expulser de France. Après avoir renoncé à les jeter sous le pont Mirabeau, et déclamé quelques vers, ils se rendent chez Le Douanier Rousseau, trop occupé à jouer à cache-cache avec un lion pour que lui soient confiés les trésors. Les deux compères repartent vers La Rotonde. Et nous voilà avec eux embarqués dans une balade imaginaire à travers Paris, où l’on croise tour à tour Utrillo, Max Jacob, Soutine, Modigliani, Marie Laurencin ou Chagall, où l’on rend visite à Matisse, Jarry ou Gertrude Stein, et ainsi quatre jours durant. Avant l’arrestation finale.
De la Rotonde au Vésinet, en passant par Montmartre et le fameux Bateau-Lavoir, on suit Dan Franck, véritable personnage du roman, narrateur omniscient et tout puissant qui fait fi de la chronologie avérée pour mêler les anecdotes, brouiller les repères chronologiques et nous faire traverser les vies du poète et du peintre en même temps que la capitale. Un régal.
Ma lecture :
Et deux amis sont aussi dans tous leurs états depuis l'annonce de la nouvelle, ce sont Picasso et Apollinaire. Le peintre a en effet peur d'être soupçonné car le présumé coupable, Géry Pieret, lui a vendu deux statues ibériques, dérobées elles aussi au Louvre quelques années plus tôt. Et ces statues lui ont fortement inspiré le tableau : Les demoiselles d'Avignon.
On saura plus tard que c'est un artisan italien qui a volé la Joconde pour la ramener dans son pays.
Mais en attendant, en ce mois d'août 1911, Apollinaire et Picasso n'en mènent pas large. Ils déambulent dans ce Paris bohème, une valise contenant les statuettes à la main. Qu'en faire ? Les déposer au Bateau-Lavoir ? On remontera jusqu'à eux. Laisser la patate chaude chez le douanier Rousseau ? Chez Matisse ?
Sous la plume de l'auteur, personnage omniscient qui éclaire cette cavalcade de succulentes anecdotes, les tableaux et les photos figés s'animent. Quel régal de voir Guillaume Apollinaire et Pablo Picasso en personnages de roman et de voir leur complicité, tels deux larrons en foire...prêts à tout pour sauver leur peau.
Le vol de la Joconde n'est pas un roman sur la Joconde, à peine sur son vol. C'est le roman d'un Paris à la fois oublié et mythifié, sur deux grands artistes de cette époque : le peintre espère à la prospérité, le poète gagne déjà bien sa vie dans les lettres et a une multitudes de projets. Le premier sera presque centenaire et le deuxième rentrera vainqueur de la première guerre mondiale pour mourir à l'armistice, de la grippe espagnole.
Pour l'heure, pour cet été 1911, où ils traversent, forcement, le Pont Mirabeau, ils sont deux jeunes artistes bohèmes en cavale dans Paris. Et cette cavale est drôle, poétique et rocambolesque. Bohème.
Quel plaisir. Quel plaisir !

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