samedi 14 juillet 2018

Pour mémoire

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Pour mémoire,

Alain Genestar,
Ed. Grasset, 2018


Mot de l'éditeur :

22 décembre 2004. Pour la première fois, Simone Veil retourne à Auschwitz avec les siens à quelques semaines du 60e anniversaire de la libération du camp. Le reportage publié dans « Paris Match » avait bouleversé les lecteurs par l’intensité de l’émotion qui s’en dégageait. A l’origine de ce « voyage », Alain Genestar, alors directeur de la rédaction du magazine. Il avait réussi à convaincre Simone Veil de revenir sur les lieux où 1 million de Juifs et 120 000 autres déportés ont été assassiné par les nazis. Si Simone Veil s’était déjà rendue à deux reprises à Auschwitz lors de cérémonies officielles, elle avait toujours refusé les sollicitations des magazines et télévisons du monde entier pour réaliser un grand sujet sur elle à l’intérieur du camp.
Simone Veil a accepté la proposition d’Alain Genestar,  touchée par le fait qu'il se soit rendu  à Auschwitz avant de formuler sa demande. Mais aussi parce qu’elle estimait qu’il était temps, pour elle, d’engager un dialogue avec ses petits enfants, et que ce dialogue devait débuter sur place, sur ces lieux symboles du plus grand crime contre l’humanité. D’où son souhait: revenir à Auschwitz-Birkenau avec ses petits enfants.
C’est ce voyage « extraordinaire » que raconte Alain Genestar dans ce petit livre pudique. Il ne dévoile pas les propos échangés entre Simone Veil, six de ses petits-enfants et ses deux fils. Ces mots intimes, ces confidences appartiennent à eux seuls. Mais il restitue les coulisses de ce voyage, et surtout l’émotion qui les envahit et le gagne lui-même. Il décrit cette longue marche familiale dans le camp. Les souvenirs de l’ancienne déportée de 17 ans qui resurgissent telles des bouffées de douleur. Mais une douleur transmise.
En deuxième partie du livre, Alain Genestar publie l’intégrale de la longue interview que lui a accordé Simone Veil au retour de ce voyage à Auschwitz. Des propos où se mêlent la dureté, la tendresse, l’absence de pardon, l’amour des autres. Et la volonté de survivre. « Là-bas, je n’ai jamais pleuré. C’était au-delà des larmes » dit Simone Veil.
Ce livre est à la fois un document pour l’histoire et un hommage à une femme d’exception qui, avant d’entrer au Panthéon, est entrée dans le cœur des Français.




Dealer : SP Grasset : merci !



Ma lecture :

Le 1er Juillet 2018, près d'un an après sa mort, Simone Veil entrait au Panthéon avec son mari, Antoine. L'occasion pour le journaliste Alain Genestar de revenir sur son voyage à Auschwitz avec Simone Veil et sa famille en 2004. Profiteur, ce journaliste, de ressortir son récit de voyage et l'interview publiée dans Paris Match en Janvier 2005 ? Non, plutôt humaniste ou messager, pour que ce drame, ce lieu, ces déportés ne soient pas banalisés, et surtout pas oubliés.

Alain Genestar propose un texte court, 70 pages, interview incluse. Nous suivons les pas de Simone Veil dans l'Auschwitz enneigé au ciel bleu. A 60 ans et à mille lieues de l'Auschwitz au ciel noir des fours crématoires et à l'odeur pestilentielle. Le ciel bleu ? Elle ne l'avait jamais vu. Il était resté noir, comme ses souvenirs. Elle a très peu parlé du camp, même à sa famille. Et c'est avec eux, ses fils et ses petits-enfants, qu'elle a accepté, pour Paris Match et pour libérer la parole, de revenir sur les lieux qui ont mis un terme à son enfance insouciante et confortable. Elle avait 16 ans lorsqu'elle est entrée à Auschwitz, comme Déborah, sa petite-fille qui l'accompagne. Peu de mots sont échangés, les lieux sont assez évocateurs. Mais la porte est désormais ouverte au questionnement. Plus tard, dans l'intimité de l'appartement parisien.

Pour mémoire a donc ce rôle-là, de sceller le passé, de l'ancrer dans le présent pour ne pas oublier, une fois les survivants disparus. Le texte ne comporte aucune fioriture, volonté de l'auteur en respect à Simone Veil. Pas besoin de figures de styles pour ressentir une émotion particulière. Je dis une émotion particulière, car, même si j'ai lu des tas d'ouvrages sur le sujet, jamais, et heureusement jamais, je ne pourrai imaginer ce qu'a ressenti Simone Veil en Avril 1944 ou en Décembre 2004. Dans son interview, elle relate les faits, sans jugements, mais ses silences en disent long. Ce sont même ces silences qui apportent toute l'émotion.

Ce récit de voyage et cette interview sont à relire, à garder au fond de soi pour mémoire. Pour relativiser, pour ne pas tout mélanger, pour avancer à la fois lourds et légers du poids du passé.
A lire, à relire, et à faire lire aux jeunes générations.
Encore une fois, merci Simone !



http://www.parismatch.com/Actu/Politique/Retour-a-Auschwitz-Simone-Veil-voulait-transmettre-l-histoire-1299800
Pour en savoir plus,
retrouvez les propos d'Alain Genestar sur ce retour à Auschwitz...


 

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